La Bible hébraïque a été traduite en grec à Alexandrie avant l’ère chrétienne: c’est la Bible des Septante, qui est juive. Durant le premier millénaire elle a été traduite en syriaque (c’est la Peshitta, qui est juive et/ou chrétienne) et en latin (c’est la Vulgate de Jérôme). De son côté, la Septante a été traduite en latin (c’est la Vieille Latine, qui est la Bible d’Augustin), en copte, en éthiopien, en slavon, en arménien, en géorgien, en arabe. Il n’est pas exagéré de dire que la Bible du premier millénaire est la Septante, et non la Bible hébraïque, qui joue un rôle secondaire. Comme toute traduction est interprétation, il y a des enjeux de sens dans les Bibles du premier millénaire, auxquels on s’intéressera.
Gilles Dorival
- Professeur émérite à l’université d’Aix-Marseille (département des sciences de l’Antiquité) - Ancien directeur et co-fondateur du Centre Paul-Albert Février - Philologue
Thèmes de recherche :
Histoire des traditions bibliques
Bible grecque des Septante
Patristique
Gilles Dorival a commencé à s’intéresser à l’histoire des religions et aux Pères grecs de l’Église dès sa première année à l’École normale supérieure de la rue d’ULM (1965-1966). Il s’initie alors à la patristique et pour mieux comprendre et interpréter les Pères et leur interprétation de la Bible il se met à l’hébreu.
Depuis quarante ans, il enquête sur les rapports entre la Bible hébraïque et les traductions grecques dont elle a fait l’objet. Il a également travaillé sur les traditions syriaques, latines, arméniennes, géorgiennes…, de la bible. Il est l’auteur avec Marguerite Harl et Olivier Munnich d’une introduction générale à « La Bible grecque des Septante », parue aux éditions du Cerf (1988, réédition en 1994). Il a également écrit, co-écrit ou dirigé 17 livres et plus de 170 articles.
L’ensemble des travaux de Gilles Dorival s’inscrit dans la lignée féconde des exégèses bibliques.
Gilles Dorival a par ailleurs occupé de nombreuses fonctions d’encadrement de la recherche et de l’enseignement supérieur, ainsi que des responsabilités éditoriales au sein de maisons d’édition et de revues scientifiques. Il a été directeur du Centre Paul-Albert Février de 2001 à 2010 et membre senior de l’Institut universitaire de France (chaire « judaïsme hellénistique et christianisme ancien ») de 2000 à 2010.
Il co-dirige la collection « La Bible d’Alexandrie » (Éditions du Cerf), qui est une traduction annotée de la Septante. Dix-huit volumes sont parus à ce jour (2012).
Téléchargez la bibliographie intégrale de Gilles Dorival :
http://www.cpaf.cnrs.fr/IMG/pdf/G-Dorival-publi-web.pdf
Présentation et bibliographie
Les Bibles du premier millénaire – Gilles Dorival – 22 et 29 octobre 2018
Pourquoi le pluriel du titre ? La Bible, mot grec qui signifie le livre, est l’ensemble des textes reconnus comme inspirés par les Juifs d’abord, puis par les chrétiens, sous le nom d’Ancien Testament, auquel les chrétiens ajoutent les 27 textes du Nouveau Testament (= 4 évangiles, Actes des apôtres, 14 lettres de Paul, 7 lettres catholiques, Apocalypse). Le mot Testament signifie « arrangement entre deux parties, alliance », i.e. alliance entre Dieu et le peuple juif ou l’humanité. La Bible hébraïque a été traduite très tôt en grec : c’est la Bible grecque des Septante (LXX). Or, pendant le premier millénaire, c’est la Septante qui a été lue dans les pays du pourtour méditerranéen (à l’exception des aires hébréophone et syriaque). L’hébreu a fait un retour en force quand il a été traduit à son tour en latin par Jérôme à la fin du 4e siècle, mais la Vulgate de Jérôme a mis plusieurs siècles à s’imposer et seulement en Occident. La LXX présente tous les textes hébreux, mais elle a des textes supplémentaires comme le livre de Judith et elle présente des écarts avec l’hébreu : des versets en plus, des versets en moins, des versets apparemment compris autrement.
22 octobre : prise de contact avec la Bible hébraïque.
29 octobre : la LXX et les autres traductions de la Bible pendant le premier millénaire.
Traductions dans la Bibliothèque de la Pléiade : L’Ancien Testament (E. Dhorme, I, 1956, II, 1959 ; Le Nouveau Testament (J. Grosjean), 1971 + La Bible. Ecrits intertestamentaires (A. Dupont-Sommer, M. Philonenko),1987 + Le Coran (D. Masson), 1967.
* La Bible hébraïque : 22/24 écrits, formant ce que la tradition juive appelle le TaNaK, un acronyme qui renvoie à trois sous-ensembles (sedarim), la Torah ou Loi, les Nebi’im ou Prophètes, les Ketubim ou Ecrits. On discute de la date de mise au point finale de cet ensemble, la fin de l’époque perse (milieu du 5e siècle avant) ou le début de l’époque hellénistique (fin du 4e siècle) sans compter des écrits plus tardifs comme Daniel. On discute encore plus de la date de rédaction de chacun des écrits. Chaque écrit, ou livre, est divisé en chapitres (d’origine chrétienne médiévale) et en versets (d’origine juive). La langue est l’hébreu, à l’exception de parties d’Esdras-Néhémie (4,8-6,18 et 7,12-26) et de Daniel (2, 5-7,28), rédigées en araméen. Dans les Talmuds, l’ordre Torah-Prophètes-Ecrits est hiérarchique. Problèmes souvent posés : récit biblique de la création vs science ; histoire d’Israël vs archéologie.
* Torah ou Loi (5 livres) : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome (titres grecs).
Genèse : histoire de la création du monde et des patriarches, Adam, Noé, Abraham, Isaac, Jacob, les 10 fils de Jacob (les tribus), en Judée et en Egypte. Lectures de 1, 1-3, 24-31 ; 2, 1-9 (la création) et de 4, 1-8 (Caïn et Abel).
Exode : histoire des Hébreux et de Moïse (vers 1250 ?) en Egypte puis en route vers la terre promise. Lecture de 3, 1-6 et 13-14 (buisson ardent).
Lévitique : suite du retour vers la Judée et organisation du culte confié à la tribu de Lévi. Lecture de 17, 10-12 (interdit du sang).
Nombres : suite de l’errance dans le désert pendant 40 ans. Lecture de 25, 1-9 (Pinhas/Phinees).
Deutéronome : paroles de Moïse au peuple. Sa mort en vue de la terre promise. Lecture de 5, 6-21 (10 commandements).
* Nebi’im ou Prophètes (8 livres) :
Josué : histoire de Josué successeur de Moïse et conquête de la terre promise (Canaan).
Juges : histoire des successeurs de Josué, les juges (Gédéon, Samson, etc.).
1-2 Samuel : établissement de la royauté (Saul, David vers – 1000). Lecture de 2 S 11, 1-12, 24.
1-2 Rois : histoire de Salomon (vers – 950) et des rois jusqu’à l’exil à Babylone (- 586).
Isaïe : prédication d’Isaïe (8e s.).
Jérémie : prédication de Jérémie (fin 7e-début 6e s.), « Nabuchodonosor mon serviteur ».
Ezéchiel : prophète de la déportation.
12 Petits Prophètes : Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habaquq, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie
* Ketubim ou Ecrits (11 livres) :
Psaumes (de David) : poèmes accompagnés de musique, hymnes, supplications, actions de grâces. Lecture du Ps 21 (22).
Job : Job et ses amis discutent du problème du mal.
Proverbes (de Salomon) : littérature de sagesse.
Ruth : comment l’étrangère Ruth est devenue l’ancêtre de David.
Cantique des cantiques (de Salomon) : chants d’amour alternés.
Ecclésiaste : littérature de sagesse.
Lamentations (de Jérémie) : 5 poèmes déplorant la destruction de Jérusalem.
Esther : comment elle épouse le roi perse Assuérus et sauve le peuple juif de l’extermination.
Daniel : prophète en exil.
Esdras-Néhémie : retour des Hébreux à Jérusalem (- 536) et interdiction du mariage avec les femmes étrangères.
Chroniques (Paralipomènes) : récapitulation de l’histoire des Hébreux, d’Adam aux rois et à la déportation à Babylone.