L’horreur du vide
Critique de la raison industrialiste
De quoi la crise du Covid 19 est-elle le nom ?
Nous attendions trop la catastrophe pour qu’elle n’advint pas enfin. Eh quoi maintenant ? De quoi est-elle le signe ? Non pas de la fin du capitalisme en tant que tel, qui n’est qu’une simple technique économique ; ni du libéralisme qui vise, dans sa version authentique, comme son nom l’indique, à libérer l’homme, mais de l’industrialisme. Autrement dit du système général d’élevage humain qui a fait du capitalisme la finalité du monde et qui a fait du libéralisme la justification de l’aliénation à soi, aux autres et à l’environnement. Médicalement, le Covid19 n’est pas un événement. Mais il a socialement muté en un événement de civilisation dont l’ampleur est absolument inédite. Entre le non-événement biologique infectieux (ou au moins l’événement banal à l’échelle des siècles) et l’ampleur extraordinaire de l’événement social, il y a un gouffre. C’est donc ce gouffre qu’il faut sonder. Comprendre comment une situation objective grave mais très limitée dans ses effets physiques réels, a pu être l’occasiond’une paralysie globale unique dans l’histoire. Être l’occasion de cette situation incommensurable, signifie que le virus n’en a pas été la cause efficiente mais le déclencheur opportun. Ce que montre remarquablement Raphaël Liogier, c’est comment l’effroi de l’infiltration du virus n’est pas tant biologique que civilisationnel et ontologique. Il met en cause notre représentation même du vivant, notre rapport à la mort, au corps, à la volonté, à l’incertitude et au vide …
Raphaël Liogier est sociologue et philosophe Professeur des universités à l’IEP d’Aix-en-Provence et au Collège international de philosophie de Paris. Depuis une vingtaine d’années il explore dans ses ouvrages les mutations de l’identité humaine. Il est notamment l’auteur aux éditions Les Liens qui libèrent de Sans emploi. Condition de l’homme postindustriel et de Descente au cœur du mâle. Il est également le coauteur du Manifeste métaphysique.