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29/10/18
Les bibles du 1er millénaire
Bibliographie 2

Les Bibles du premier millénaire – Gilles Dorival –

29 octobre 2018

Les traductions de la Bible hébraïque :

* en grec : au 3e s. avant, à Alexandrie, la Torah, sous les auspices des Ptolémées. Au cours des siècles suivants, les autres livres, à Alexandrie, à Jérusalem, ailleurs. Derniers livres traduits : Ruth, Lamentations, Cantique, Ecclésiaste, entre + 30 et + 125. Autres traductions en grec : Théodotion (+ 50), Aquila (vers 130), Symmaque (vers 160-180).

* en syriaque : la Peshitta (« simple » par opposition à savante), soit par des Juifs, soit par des chrétiens, soit par les deux groupes. Histoire textuelle complexe, marquée par l’influence de la LXX et des réalignements sur l’hébreu. C’est l’Ancien Testament de l’Eglise syriaque.

* en latin : la Vulgate de Jérôme, à la fin du 4e siècle. Elle ne s’impose pas avant le 6e siècle et même le Moyen Âge.

* en arabe : au 10e s., par Saadiah Gaon, à Babylone ; il y a des versions arabes postérieures ; certaines sont faites sur la Peshitta et/ou la Syro-Hexaplaire ou encore sur les versions coptes.

Les traductions de la Bible grecque :

* en latin : par les chrétiens vers la fin du 2e s. ; c’est la vieille latine, à l’histoire textuelle complexe ; c’est l’Ancien Testament des Pères latins (Augustin).

* en copte (= égyptien des chrétiens) : vers 150-200 ; plusieurs traductions.

* en gothique : vers 350, par Ulfila.

* en arménien : par Mesrob Machtotz assisté de Sabak le catholikos, au début du 5e siècle ; peut-être traduite sur la Peshitta, mais alors révisée sur la LXX à travers les siècles.

* en géorgien : à partir du 5e s., sur le texte arménien, mais la traduction est révisée sur la LXX.

* en éthiopien guèze : vers 500 ; version révisée à travers les siècles, puis traduite tardivement en éthiopien amharique. C’est la Bible des Juifs falashas.

* en syriaque : Syro-Hexaplaire, traduction de la colonne LXX des Hexaples d’Origène, achevée en 616-617 à Alexandrie par Paul de Tella ; adoptée par une bonne partie des commentateurs syriaques.

* en vieux slave : par Cyrille et Méthode, au 9e s. ; version remaniée à travers les siècles sur l’hébreu, le grec et le latin.

* en arabe : au 9e s., par Hunayn ibn Ishaq.

L’originalité de la LXX : elle n’est pas organisée comme la Bible hébraïque ; elle contient tous les livres de cette dernière, mais ajoute des livres et des passages ; elle a des versets en plus et en moins ; elle présente des différences d’interprétation. Traductions en allemand, anglais, français (« La Bible d’Alexandrie »), italien, etc.

  • La LXX ne connaît pas la Loi, les Prophètes et les Ecrits, mais seulement la Loi et les Prophètes, qui forment un seul ensemble. Il n’y a pas de hiérarchie entre les livres, qui sont à égalité pour l’argumentation (voir Matthieu 12, 1-8, les apôtres ramassent des épis le jour du sabbat ; les Pharisiens argumentent à partir de la Loi, Jésus à partir de 1 Samuel 21, 1-6).

* Les deutérocanoniques/apocryphes : leur nombre varie selon les manuscrits. Ecrits juifs :

1 Esdras (= 3 Esdras de la Vulgate), traduit sur l’hébreu, qui raconte la même histoire que l’Esdras hébreu, mais a des ajouts (qui est plus fort que le roi : le vin, les femmes ou la vérité ?).

Judith (original hébreu) : comment une jeune veuve décapite le général assyrien Holopherne.

Tobit (original araméen et hébreu) : histoire de Tobit et de son fils Tobie.

Siracide ou Sagesse de Jésus fils de Sirakh (original hébreu) : vers – 200

Sagesse (de Salomon) : vers – 50, à Alexandrie.

Psaumes de Salomon (original hébreu) : vers – 50.

1 Maccabées (original hébreu) : histoire de la révolte juive entre – 175 et -135.

2 Maccabées (original grec) : histoire de la révolte juive entre – 175 et – 160.

3 Maccabées (original grec) : les Juifs menacés à Jérusalem et en Egypte par Ptolémée IV Philopator (fin du 3e s.).

4 Maccabées (original grec) : la raison pieuse maîtrise les passions, comme le montrent les martyres d’Eléazar et de la mère et de ses 7 fils.

* Les passages supplémentaires (rédigés par des Juifs) :

Additions à Jérémie : Baruch (traduit de l’hébreu et de l’araméen) et Lettre de Jérémie (grec).

Addition aux Psaumes : Ps 151.

Addition à Daniel : histoire des 3 jeunes gens ; Suzanne, Bel et le dragon.

Additions à Esther (où figure le nom de Dieu).

* Versets différents :

Genèse 4, 7 (Dieu agrée le sacrifice d’Abel, mais non celui de Caïn). Hébreu « Est-ce qu’il n’y aura pas, si tu agis bien, élévation ? Et, si tu n’agis pas bien, à la porte le péché [est] tapi ». Grec : « Si tu as présenté correctement, mais partagé non correctement, n’as-tu pas péché ? Reste tranquille ».

Isaïe 28, 9-11. Hébreu « Ordre sur ordre, règle sur règle, un peu par ici, un peu par ici » (moquerie à l’égard du prophète dont les propos seraient des bégaiements ; ou imitation de l’enseignement élémentaire comparé à un balbutiement). Grec : « Reçois épreuve sur épreuve, reçois espérance sur espérance, encore un peu, encore un peu ».

22/10/18
Les bibles du 1er millénaire
Bibliographie 1

Les Bibles du premier millénaire – Gilles Dorival

22 et 29 octobre 2018

Pourquoi le pluriel du titre ? La Bible, mot grec qui signifie le livre, est l’ensemble des textes reconnus comme inspirés par les Juifs d’abord, puis par les chrétiens, sous le nom d’Ancien Testament, auquel les chrétiens ajoutent les 27 textes du Nouveau Testament (= 4 évangiles, Actes des apôtres, 14 lettres de Paul, 7 lettres catholiques, Apocalypse). Le mot Testament signifie « arrangement entre deux parties, alliance », i.e. alliance entre Dieu et le peuple juif ou l’humanité. La Bible hébraïque a été traduite très tôt en grec : c’est la Bible grecque des Septante (LXX). Or, pendant le premier millénaire, c’est la Septante qui a été lue dans les pays du pourtour méditerranéen (à l’exception des aires hébréophone et syriaque). L’hébreu a fait un retour en force quand il a été traduit à son tour en latin par Jérôme à la fin du 4e siècle, mais la Vulgate de Jérôme a mis plusieurs siècles à s’imposer et seulement en Occident. La LXX présente tous les textes hébreux, mais elle a des textes supplémentaires comme le livre de Judith et elle présente des écarts avec l’hébreu : des versets en plus, des versets en moins, des versets apparemment compris autrement.

22 octobre : prise de contact avec la Bible hébraïque.

29 octobre : la LXX et les autres traductions de la Bible pendant le premier millénaire.

Traductions dans la Bibliothèque de la Pléiade : L’Ancien Testament (E. Dhorme, I, 1956, II, 1959 ; Le Nouveau Testament (J. Grosjean), 1971 + La Bible. Ecrits intertestamentaires (A. Dupont-Sommer, M. Philonenko),1987 + Le Coran (D. Masson), 1967.

* La Bible hébraïque : 22/24 écrits, formant ce que la tradition juive appelle le TaNaK, un acronyme qui renvoie à trois sous-ensembles (sedarim), la Torah ou Loi, les Nebi’im ou Prophètes, les Ketubim ou Ecrits. On discute de la date de mise au point finale de cet ensemble, la fin de l’époque perse (milieu du 5e siècle avant) ou le début de l’époque hellénistique (fin du 4e siècle) sans compter des écrits plus tardifs comme Daniel. On discute encore plus de la date de rédaction de chacun des écrits. Chaque écrit, ou livre, est divisé en chapitres (d’origine chrétienne médiévale) et en versets (d’origine juive). La langue est l’hébreu, à l’exception de parties d’Esdras-Néhémie (4,8-6,18 et 7,12-26) et de Daniel (2, 5-7,28), rédigées en araméen. Dans les Talmuds, l’ordre Torah-Prophètes-Ecrits est hiérarchique. Problèmes souvent posés : récit biblique de la création vs science ; histoire d’Israël vs archéologie.

* Torah ou Loi (5 livres) : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome (titres grecs).

Genèse : histoire de la création du monde et des patriarches, Adam, Noé, Abraham, Isaac, Jacob, les 10 fils de Jacob (les tribus), en Judée et en Egypte. Lectures de 1, 1-3, 24-31 ; 2, 1-9 (la création) et de 4, 1-8 (Caïn et Abel).

Exode : histoire des Hébreux et de Moïse (vers 1250 ?) en Egypte puis en route vers la terre promise. Lecture de 3, 1-6 et 13-14 (buisson ardent).

Lévitique : suite du retour vers la Judée et organisation du culte confié à la tribu de Lévi. Lecture de 17, 10-12 (interdit du sang).

Nombres : suite de l’errance dans le désert pendant 40 ans. Lecture de 25, 1-9 (Pinhas/Phinees).

Deutéronome : paroles de Moïse au peuple. Sa mort en vue de la terre promise. Lecture de 5, 6-21 (10 commandements).

* Nebi’im ou Prophètes (8 livres) :

Josué : histoire de Josué successeur de Moïse et conquête de la terre promise (Canaan).

Juges : histoire des successeurs de Josué, les juges (Gédéon, Samson, etc.).

1-2 Samuel : établissement de la royauté (Saul, David vers – 1000). Lecture de 2 S 11, 1-12, 24.

1-2 Rois : histoire de Salomon (vers – 950) et des rois jusqu’à l’exil à Babylone (- 586).

Isaïe : prédication d’Isaïe (8e s.).

Jérémie : prédication de Jérémie (fin 7e-début 6e s.), « Nabuchodonosor mon serviteur ».

Ezéchiel : prophète de la déportation.

12 Petits Prophètes : Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habaquq, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie

* Ketubim ou Ecrits (11 livres) :

Psaumes (de David) : poèmes accompagnés de musique, hymnes, supplications, actions de grâces. Lecture du Ps 21 (22).

Job : Job et ses amis discutent du problème du mal.

Proverbes (de Salomon) : littérature de sagesse.

Ruth : comment l’étrangère Ruth est devenue l’ancêtre de David.

Cantique des cantiques (de Salomon) : chants d’amour alternés.

Ecclésiaste : littérature de sagesse.

Lamentations (de Jérémie) : 5 poèmes déplorant la destruction de Jérusalem.

Esther : comment elle épouse le roi perse Assuérus et sauve le peuple juif de l’extermination.

Daniel : prophète en exil.

Esdras-Néhémie : retour des Hébreux à Jérusalem (- 536) et interdiction du mariage avec les femmes étrangères.

Chroniques (Paralipomènes) : récapitulation de l’histoire des Hébreux, d’Adam aux rois et à la déportation à Babylone.

31/01/17
Les usages publics de l’histoire 2/3
Stéphane Rio – Histoire

Les enjeux politiques des interprétations de la Révolution française

Les interprétations de la Révolution Française : enjeux de mémoire, enjeux politiques

Qu’est-ce que la Révolution Française ? La question est simple, mais les réponses apportées sont d’une immense complexité tant elles sont contradictoires, conflictuelles et passionnées :

  • Une fracture satanique d’un ordre éternel et providentiel ? Un immense bain de sang préfigurant les totalitarisme ?
  • Une rupture libératrice non seulement pour le peuple français, mais aussi pour le genre humain à l’échelle universelle ?

Nous étudierons les débats sur les origines, les acteurs et les héros de la Révolution pour comprendre la construction des clivages politiques qui prennent racines dans ces interprétations.

Les documents proposés par Stéphane Rio sont ici :

Textes 31-01-17

10/01/17
Le Capital du 21ème siècle de Thomas Piketty 2/3
Economie – Bernard Tabuteau

Document de présentation proposé par Bernard Tabuteau

Télécharger au format pdf en cliquant sur le lien ci-dessous :

PIKETTY UPPAE

LE CAPITAL DU XXIe SIECLE

« Livre le plus important de la décennie » (Krugman), traduit en 40 langues

Piketty replace son analyse du capital au 21ème siècle dans une histoire générale du patrimoine et des inégalités depuis le début 18ème siècle.

Il montre que le Capital a eu tendance tout au long de son histoire à produire des niveaux d’inégalité croissants parce que le rendement du Capital (r) excède le taux de croissance du Revenu national (g). C’est la contradiction centrale du Capital.

La richesse par le patrimoine s’accroît par les revenus qu’il génère à un rythme supérieur à celui des revenus salariaux. C’est la cause principale de l’importance du patrimoine / aux revenus. Continuer la lecture de 10/01/17
Le Capital du 21ème siècle de Thomas Piketty 2/3
Economie – Bernard Tabuteau

Bibliographie des séances sur Henri Lefebvre

Henri Lefebvre (1901-1991)

Près de dix ans après sa mort, la pensée d’Henri Lefebvre demeure, sinon incomprise ou méconnue, du moins mal interprétée, parce qu’il n’a jamais été facile de la classer sur la table de Mendeleiev de la « pensée contemporaine ». Trop communiste pour être philosophe, trop philosophe pour être communiste, Lefebvre n’a sans doute pas su se construire un profil de carrière susceptible de le faire reconnaître pleinement par l’une ou l’autre des institutions, de se muer en académicien de la conscience comme Sartre ou Aron, ou en apparatchik politique comme Aragon. Cela est bien connu lorsqu’il s’agit de l’histoire de ses rapports avec le parti communiste. Venant de l’avant-garde politico-mystique (le groupe Philosophies), il y entre en 1928, mais pour tenter de faire de la théorie marxiste à l’heure où Staline prépare la collectivisation et où Thorez va mettre en place la stalinisation à la française. On comprend que les intellectuels-de-parti n’aient pas su par quel bout prendre quelqu’un qui travaillait non seulement, le premier en France, sur les fameux « manuscrits de jeunesse » de Marx destinés à un si bel avenir de coupure épistémologique, mais aussi sur Hegel, sur Nietzsche, sur Kierkegaard, sur Pascal. La seule époque où Henri Lefebvre fera figure de « philosophe officiel » du PCF durera de la Libération à l’automne 1947, et c’est la seule où il donnera quelques gages douteux de bonne volonté, en particulier dans l’« affaire Nizan ». Mais c’est aussi le moment où il publie des ouvrages bien éloignés de la « science prolétarienne », en particulier le premier volume de Critique de la vie quotidienne. Sa rupture avec le stalinisme, progressive dès 1953, ouverte dès avant 1956, conduira à son exclusion en 1958 (Michel Trebitsch : L’exclusion d’Henri Lefebvre en 1958 : philosophie et politique)..
On ne peut donc s’étonner que le parti communiste ne se soit pas réellement intéressé à la pensée de Lefebvre, sauf à des fins publicitaires, puis pour le condamner, avant de le réintroduire à partir des années 1980. Ce qui est autrement plus captivant et même énigmatique, c’est la relation établie par la philosophie française avec le marxisme lefebvrien. La place qui lui est accordée dans les (rares) ouvrages sur la question est étonnamment limitée, voire nulle. Qu’on aimerait rappeler, pourtant, à Vincent Descombes que Le Même et l’autre est le titre de l’introduction rédigée par Henri Lefebvre aux Recherches philosophique sur l’essence de la liberté humaine de Schelling, parues chez Rieder en 1926 ! On peut émettre l’hypothèse que la méconnaissance à l’égard de Lefebvre est, en France, à l’exacte mesure de la fascination équivoque exercée par Heidegger. La phénoménologie à la française, qu’elle se soit appelée existentialisme dans les années 1950 ou structuralisme dans les années 1960, ne pouvait susciter qu’un mécanisme de rejet à l’endroit de la tentative de greffe lefebvrienne. Le débat avec Henri Lefebvre a été minutieusement circonscrit : quelques lignes chez Sartre (Critique de la raison dialectique), quelques affrontements plus sérieux sur Pascal et l’aliénation avec Lucien Goldmann, c’est-à-dire, indirectement, avec Lukàcs. Voilà pourquoi ce n’est jamais véritablement la pensée de Lefebvre qui a été discutée en France (à la différence de l’Allemagne, de l’Italie et, plus récemment, des États-Unis), mais son statut de philosophe. Défini avant tout comme sociologue (du quotidien, de la ville, de l’urbain, avant tout) et enfermé dans cette fonction, il ne pouvait qu’être perdant face à la montée en puissance de la sociologie américaine d’un côté, du monolithe bourdivin de l’autre. Mais personne n’a tenté d’éclairer les choix sociologiques de Lefebvre par sa posture philosophique, c’est-à-dire la volonté d’introduire dans la pensée, de faire accéder à la pensée, comme il aimait à le dire, un certain nombre de concepts, parmi lesquels, au tout premier rang, celui de quotidienneté et celui de modernité (Michel Trebitsch : Henri Lefebvre en regard de Michel de Certeau : Critique de la vie quotidienne). On lui lançait alors un autre reproche oblique : ses élaborations conceptuelles demeuraient approximatives, sinon fumeuses. Et depuis quand le « je ne sais quoi » a-t-il empêché Jankelevitch d’être pris pour un philosophe et non pas pour un essayiste ?
Henri Lefebvre a beaucoup écrit, peut-être trop, et s’il s’est répété souvent, c’est qu’une même interrogation parcourt l’ensemble de son oeuvre. Ses premiers textes publiés, en 1924-1925, sont des « Fragments d’une philosophie de la conscience ». De La Conscience mystifiée (1936) à Critique de la vie quotidienne (1947), d’Introduction à la modernité (1962) à La Fin de l’histoire (1970), de La Présence et l’absence (1980) à Qu’est-ce que penser ? (1985), il n’a cessé de vouloir fournir à cette interrogation sur les conditions de la conscience une réponse qui soit à la fois philosophique et métaphilosophique, parce que le marxisme lui apparaissait à la fois comme philosophie et dépassement de la philosophie. Les seuls qui aient réellement tenté de débattre avec Henri Lefebvre, ce sont les milieux chrétiens : le personnalisme aux temps de la naissance d‘Esprit, des jésuites comme le Père Calvez au lendemain de la guerre. Ce n’est pas un hasard. La phénoménologie à la française s’est construite à la fois contre le marxisme et contre la partie la plus visible, ou du moins la plus militante, de l’existentialisme chrétien. Peut-être est-ce ce dernier qui, au bout du compte, l’a emporté ; mais quand se constitue l’existentialisme sartrien, puis quand se met en branle, via Lévi-Strauss, Barthes ou Althusser, la victoire structuraliste des « sciences de l’homme » sur la philosophie, c’est par référence et en situation polémique par rapport au marxisme. C’est en ce sens que, face à Marx, il fallait un héros (héraut ?) – Heidegger – et des vérités marginales (Kojève, Bataille, le Collège de sociologie) ou exotiques (Lukàcs, Marcuse, l’école de Francfort), et surtout pas chercher, là, sous nos pieds, si quelqu’un d’autre s’essayait aux mêmes exercices spirituels : pourquoi des penseurs en temps de détresse ?

Michel Trebitsch


Ouvrages d’Henri Lefebvre

(NB : cette bibliographie sera progressivement augmentée de celle des articles d’Henri Lefebvre et des études sur lui. Elle reprend et complète celle parue dans Rémi Hess, Henri Lefebvre et l’aventure du siècle, Paris, A. M. Métailié, 1988)

– Schelling, Recherches philosophiques sur l’essence de la liberté humaine et sur les problèmes qui s’y rattachent, introduction (« Le même et l’autre », p. 7-64), traduction de Georges Politzer, Paris, Rieder, 1926.
– (en collaboration avec Norbert Guterman) Karl Marx, Morceaux choisis, introduction, textes choisis par Paul Nizan et Jean Duret, Paris, NRF, 1934 (rééd. partielle. Karl Marx, Œuvres choisies, Paris, Gallimard, 1963-1964, 2 vol., coll. « Idées »).
– (en collaboration avec Norbert Guterman) La Conscience mystifiée, Paris, NRF, 1936, coll. « Les Essais » (rééd., Paris, Le Sycomore, 1979 ; Paris, Syllepse, 1999, augmentée de La Conscience privée, préfaces de Lucien Bonnafé et René Lourau).
Le Nationalisme contre les nations, préface de Paul Nizan, Paris, Éditions sociales internationales, 1937, coll. « Problèmes » (rééd. avec présentation de Michel Trebitsch et postface d’Henri Lefebvre, Paris, Méridiens Klincksieck, 1988).
Hitler au pouvoir. Les enseignements de cinq années de fascisme en Allemagne, Paris, Bureau d’éditions, 1938.
– (en collaboration avec Norbert Guterman) Cahiers de Lénine sur la dialectique de Hegel, traduction, introduction et notes, Paris, NRF, 1938 (rééd. Paris, Gallimard, 1967, coll. « Idées »).
(en collaboration avec Norbert Guterman) Hegel, Morceaux choisis, traduction et introduction, Paris, NRF, 1939 (rééd. Paris, Gallimard, 1969, 2 vol., coll. « Idées »).
Nietzsche, Paris, Éditions sociales internationales, 1939, coll. « Socialisme et culture » (rééd. Paris, Syllepse, avec une préface de Michel Trebitsch, à paraître).
Le Matérialisme dialectique, Paris, Alcan, 1940, « Nouvelle encyclopédie philosophique » (rééd. Paris, PUF, 1947, 7e en 1974).
L’Existentialisme, Paris, Éditions du Sagittaire, 1946.
Logique formelle, logique dialectique (tome 1 de A la lumière du matérialisme dialectique), Paris, Éditions sociales, 1947 (2e éd. avec préface, Paris, Anthropos, 1969, 3e éd. Paris, – Messidor-Éditions sociales, 1982).
Critique de la vie quotidienne, I. Introduction, Paris, Grasset, 1947, coll. « Les Témoins » (rééd. avec avant-propos, Paris, L’Arche, 1958, coll. « Le sens de la marche »).
Marx et la liberté, Genève, Éditions des Trois collines, 1947.
Descartes, Paris, Éditions d’Hier et d’aujourd’hui, 1947.
Pour connaître la pensée de Karl Marx, Paris, Bordas, 1948, coll. « Pour connaître » (2e éd. augmentée avec préface d’avril 1955, Paris, Bordas, 1956 ; 3e éd. avec préface de février 1985, Paris, Bordas, 1985).
Le Marxisme, Paris, PUF, 1948, coll. « Que sais-je ? » n° 300 (20e éd. 1983).
Diderot, Paris, Les Éditeurs français réunis, 1949, coll. « Hier et aujourd’hui » (rééd. Diderot, ou les affirmations fondamentales du matérialisme, Paris, L’Arche, 1983, coll. « Le sens de la marche »).
Pascal, tome 1, Paris, Nagel, 1949, coll. « Pensées ».
Contribution à l’esthétique, Paris, Éditions sociales, 1953.
Pascal, tome 2, Paris, Nagel, 1954, coll. « Pensées ».
Musset, Paris, L’Arche, 1955, coll. « Les grands dramaturges » (2e éd. revue et corrigée, 1970, coll. « Travaux »).
Rabelais, Paris, Les Éditeurs français réunis, 1955.
Pignon, Paris, Édition Falaise, 1956 (2e éd. augmentée, Paris, Le Musée de Poche, Jacques Goldschmidt, ill., 1970).
Pour connaître la pensée de Lénine, Paris, Bordas, 1957, coll. « Pour connaître ».
Problèmes actuels du marxisme, Paris, PUF, 1958 (4e éd., 1970, coll. « Initiation philosophique »).
Allemagne, Paris-Zurich, Éd. Braun-Atlantis Verlag, photos et notices par Martin Hurlimann, 1958.
La Somme et le reste, Paris, La Nef de Paris, 2 vol., 1959 (2e éd. tome 2 seulement, Paris, Bélibaste, 1973 ; 3e éd. complète, présentation de René Lourau, Paris, Méridiens Klincksieck, 1989).
Critique de la vie quotidienne, II. Fondements d’une sociologie de la quotidienneté, Paris, L’Arche, 1962.
Introduction à la modernité, Paris, Éditions de Minuit, 1962, coll. « Arguments ».
La vallée de Campan. Étude de sociologie rurale, Paris, PUF, 1963, coll. « Bibliothèque de sociologie contemporaine ».
Marx, Paris, PUF, 1964, coll. « Philosophes ».
Pyrénées, Lausanne, Éd. Rencontre, 1965, coll. « L’Atlas des voyages ».
Métaphilosophie, Paris, Éditions de Minuit, 1965, coll. « Arguments » (rééd. Paris, Syllepse, 2000, préface de Georges Labica).
La Proclamation de la Commune, Paris, Gallimard, 1965, coll. « Trente journées qui ont fait la France ».
Le Langage et la société, Paris, Gallimard, 1966, coll. « Idées ».
Sociologie de Marx, Paris, PUF, 1966, coll. « Sup » (3e éd. 1974, coll. « Le sociologue »).
Position : contre les technocrates, Paris, Gonthier, 1967 (rééd. Vers le cybernanthrope, contre les technocrates, Paris, Denoël-Gonthier, 1971, coll. « Médiations »).
Le Droit à la ville, Paris, Anthropos, 1968.
La Vie quotidienne dans le monde moderne, Paris, Gallimard, 1968, coll. « Idées ».
L’Irruption de Nanterre au sommet, Paris, Anthropos, 1968 (rééd. Mai 1968, l’irruption de Nanterre au sommet, Paris, Syllepse, 1998, oréface et postface de René Lourau, René Mouriaux, Pierre Cours-Salies).
Du rural à l’urbain, Paris, Anthropos, 1970.
La Révolution urbaine, Paris, Gallimard, 1970, coll. « Idées ».
La Fin de l’histoire, Paris, Editions de Minuit, coll. « Arguments », 1970.
Le Manifeste différentialiste, Paris, Gallimard, 1971, coll. « Idées ».
Au-delà du structuralisme, Paris, Anthropos, 1971.
La Pensée marxiste et la ville, Paris-Tournai, Castermann, 1972, coll. « Mutations-Orientations ».
Trois textes pour le théâtre (Dans le ventre du cheval, L’incendiaire, Je-tu(e)-il ou : le chant du signe), Paris, Anthropos, 1972.
– (avec Pierre Fougeyrollas) Le Jeu de Kostas Axelos, Montpellier, Fata Morgana, 1973;
Espace et politique (Le droit à la ville II), Paris, Anthropos, 1973.
La Survie du capitalisme, la reproduction des rapports de production, Paris, Anthropos, 1973.
La Production de l’espace, Paris, Anthropos, 1974.
Le Temps des méprises, Paris, Stock, 1975, coll. « Les grands leaders ».
Hegel, Marx, Nietzsche ou le royaume des ombres, Paris-Tournai, Castermann, 1975, coll. « Synthèses contemporaines ».
L’Idéologie structuraliste, Paris, Seuil, 1975, coll. « Points » (rééd. partielle de Au-delà du structuralisme).
De l’État, Paris, UGE, coll. « 10:18 », 4 tomes :
1. L’État dans le monde moderne, 1976.
2. Théorie marxiste de l’État de Hegel à Mao, 1976.
3. Le mode de production étatique, 1977.
4. Les contradictions de l’État moderne (La dialectique et/de l’État), 1978.
– (en collaboration avec Catherine Régulier) La Révolution n’est plus ce qu’elle était, Paris, Editions libres-Hallier, 1978.
La Présence et l’absence. Contribution à la théorie des représentations, Paris, Castermann, 1980, coll. « Synthèses contemporaines ».
Une pensée devenue monde. Faut-il abandonner Marx ?, Paris, Fayard, 1980.
Critique de la vie quotidienne, III. De la modernité au modernisme (Pour une métaphilosophie du quotidien), Paris, L’Arche, 1981, coll. « Le sens de la marche ».
Qu’est-ce que penser ?, Paris, Publisud, 1985.
Le Retour de la dialectique. Douze mots-clefs pour le monde moderne, Paris, Messidor-Editions sociales, 1986, coll. « Théorie ».
Lukacs 1955, Paris, Aubier, 1986 (avec Patrick Tort, Etre marxiste aujourd’hui).
– (en collaboration avec le groupe de Navarrenx) Du contrat de citoyenneté, Paris, Syllepse et Périscope, 1991.
Éléments de rythmanalyse. Introduction à la connaissance des rythmes, préface de René Lourau, Paris, Syllepse, 1992.

 


 

Travaux de Michel Trebitsch sur Henri Lefebvre

Préfaces

– Henri Lefebvre, Le Nationalisme contre les nations, réédition, Paris, Méridiens Klincksieck, 1988, p. 7-17.
– Henri Lefebvre, Critique of Everyday Life. Volume I. Introduction, traduction anglaise, Londres, Verso, 1991, p. IX-XXVIII.
– Henri Lefebvre, Critique of Everyday Life. Volume II. Foundations for a Sociology of the Everyday, traduction anglaise, Londres, Verso, 2002, p. IX-XXIX.
– Henri Lefebvre, Nietzsche, réédition, Paris, Syllepse, à paraître.
– Henri Lefebvre, Critique of Everyday Life. Volume III. (1981), traduction anglaise, Londres, Verso, à paraître 2004.

Articles et contributions

– « Le philosophe et le politique », dans Henri Lefebvre, Lukàcs 1955 / Patrick Tort, Etre marxiste aujourd’hui, Paris, Aubier, 1986, p. 21-24.
– « Le renouveau philosophique avorté des années trente », entretien avec Henri Lefebvre, Europe, n° 683, mars 1986, p. 28-40.
– « Les mésaventures du groupe Philosophies (1924-1933) », La Revue des revues, n° 3, printemps 1987, p. 6-9.
– « Le groupe Philosophies, de Max Jacob aux Surréalistes », dans Jean-François Sirinelli (dir.), « Générations intellectuelles », Cahiers de l’IHTP, n° 6, novembre 1987, p. 29-38.
– « Henri Lefebvre et la revue Avant-Poste : une analyse marxiste marginale du fascisme », Lendemains, n° 57, 1990, p. 77-88.
– « Le groupe Philosophies et les surréalistes (1924-1925) », Mélusine, n° XI, 1990, p. 63-86.
– « Philosophie et marxisme dans les années trente : le marxisme critique d’Henri Lefebvre », dans Régine Robin (dir.), L’Engagement des intellectuels dans la France des années trente (Actes du colloque de l’UQAM, Montréal, mai 1989), Université du Québec à Montréal, 1990, p. 12-44 (version anglaise dans « Engagement : French cultural politics in the Thirties », Annals of Scholarship, 1991, vol. 8, n° 1, p. 9-32.).
– « Henri Lefebvre : Critique de la vie quotidienne », Revue M, n° 50, décembre 1991, p. 27-33.
– « Correspondances d’intellectuels. Le cas des lettres d’Henri Lefebvre à Norbert Guterman (1935-1947) », dans Nicole Racine et Michel Trebitsch (dir.), Sociabilités intellectuelles. Lieux, milieux, réseaux, Cahiers de l’IHTP, n° 20, mars 1992, p. 70-84.
– « Le front commun de la jeunesse intellectuelle. Le « Cahier de revendications » de décembre 1932 », dans Gilbert Merlio (dir.), Ni gauche, ni droite : les chassés-croisés idéologiques des intellectuels français et allemands dans l’entre-deux-guerres, Bordeaux, Editions de la MSH d’Aquitaine, 1995, p. 209-227.
– « Henri Lefebvre », dans Jacques Julliard et Michel Winock (dir.), Dictionnaire des intellectuels, Paris, Seuil, 1996, p. 691-693.
– « Henri Lefebvre et la critique radicale », dans Séminaire de recherche « Les années 68 : événements, cultures politiques et modes de vie » (IHTP, 17 mars 1997), Lettre d’information, n° 23, juillet 1997, p. 1-23.
– « Voyages autour de la révolution. Les circulations de la pensée critique de 1956 à 1968 », in G. Dreyfus-Armand, R. Frank, M.-F. Lévy, M. Zancarini-Fournel, Les Années 68. Le temps de la contestation, Bruxelles, Complexe, 2000, p. 69-87.
– « Henri Lefebvre en regard de Michel de Certeau : Critique de la vie quotidienne », in Christian Delacroix, François Dosse, Patrick Garcia, Michel Trebitsch (dir.), Michel de Certeau, les chemins d’histoire, Bruxelles, Complexe, 2002, p. 141-157.
– « Henri Lefebvre et l’autogestion », in Frank Georgi (dir.), Autogestion. La dernière utopie ? (actes du colloque CHS, Paris 1, juin 2001), Paris, Publications de la Sorbonne, 2003, p. 65-77.

 


Sites web sur Henri Lefebvre

Rob Shields :
http://www.carleton.ca/~rshields/lefebvre.htm

Lefebvre et l’urbain :
http://www.univ-tours.fr/editions/som27.htm

Sites situationnistes :
http://www.notbored.org
http://www.chez.com/debordiana/francais

Séminaire Georges Pérec :
http://www.associationperec.org/seminaire/200102/matthieuremy.html

Stuart Elden
http://www.anarchitektur.com/aa01-lefebvre/elden.html
http://home.clara.net/stuart.elden/ppg.htm

Andrew Merrifield :
http://www.rgs.org/trans/93184/93184006.pdf